Livres
Le Médoc il y a 200 ans
Ces deux livres sont le fruit du travail monumental de deux auteurs. D’abord celui de Claude Masse, ingénieur du roi Louis XIV, qui cartographie, pendant 36 ans, une grande partie des côtes atlantique – et des terres intérieures – afin d’en assurer les défenses. Ensuite le travail de recherche de Yannis Suire qui regroupe et analyse ses cartes et ses écrits dans deux magnifiques ouvrages. Ils se recoupent en partie d’ailleurs puisque les deux débutent leur exploration aux alentours de «l’embouchure de la Garonne que l’on appelle vulgairement Gironde depuis là où elle se joint au Bec d’Ambès avec la Dordogne. Les marins l’appellent la rivière de Bordeaux. C’est une des plus belles et des plus larges d’Europe.» Il décrit également le phare de Cordouan, «sur les dessins de Louis de Foix, le plus habile ingénieur et architecte de son temps, et l’on en peut juger par la somptuosité de cet édifice qui est un des plus superbes qui subsistent peut-être au monde de son espèce». Ainsi, de l’île d’Oléron jusqu’à Bordeaux en passant par Royan, Saint-Palais, Vaux, La Tremblade, Meschers, la pointe de Grave, la rive Médocaine et ainsi tout au long de l’estuaire, pour un livre, et jusqu’à Hendaye en passant par Grayan, Naujac, Vendays-Montalivet ou encore Lacanau pour l’autre livre, on découvre grâce à ces documents l’évolution des territoires depuis la fin du XVIIe siècle.
Le grand format, le nombre de reproductions des cartes à l’échelle proche de 1 et les récits et analyses font de ces livres des ouvrages de référence, même si on aurait aimé que certaines cartes, trop sombres, soient retravaillées.
L’estuaire de la Gironde, Bordeaux et le Bordelais vers 1700, Yannis Suire, éd. La Geste, 470 pages, 39 €
Le Médoc, Arcachon, les Landes et le pays Basque vers 1700, Yannis Suire, éd. La Geste, 326 pages, 39 €
14-18 en mer
En cette période de triste centenaire de la guerre 1914-1918, Roland Mornet revient sur le conflit, côté mer, le long de nos côtes atlantiques. L’auteur commence son récit chronologique par les forces en présence en Allemagne, en France et en Angleterre, et l’importance croissante que vont prendre les sous-marins dans ce conflit. Ainsi, le 7 septembre 1915, le navire à vapeur anglais Caroni est torpillé au large de la pointe de Chassiron. Il se rendait au port de Bordeaux pour livrer des habits militaires, des blindages pour tranchées et «des voitures d’ambulances automobiles». Roland Mornet revient ainsi sur de nombreuses attaques des sous-marins allemands, jusqu’à cette terrible année 1917 où ils sont presque chez eux des abords des côtes de Vendée, de la Gironde et des Landes. Certains prennent l’aspect de bateaux de pêche ou de petits navires de cabotage (car les sous-marins sont beaucoup plus rapides sur l’eau que sous l’eau), voire même de voiliers, ce qui leur permet de s’approcher au plus près de leurs cibles. Quand les bateaux attaqués s’en aperçoivent, il est alors trop tard pour faire demi-tour… Le livre se lit comme un roman d’infortunes en mer, sauf que les faits, basés sur des recherches dans les archives militaires, sont malheureusement bien réels.
1914-1918 La guerre en mer, Roland Mornet, éd. La Geste, 256 pages + 16 pages de documents d’archives, 23 €
Histoire du surf
Un condensé de surf, pour en reprendre des petites doses tout au long de l’hiver, voilà comment on pourrait présenter ce livre sorti au début de l’automne. Ecrit par une référence du domaine, Matt Warshaw, ancien rédacteur en chef de Surfer Magazine, ce beau livre au format pratique (pas trop grand ni trop lourd) regroupe une mine d’informations et de photos souvent inédites. On peut y piocher au hasard puisque chaque double page aborde un sujet, systématiquement illustré. Les chapitres regroupent les articles dans l’ordre chronologique, depuis la naissance de la première forme du surf, au Pérou il y a 3 000 ans, quand les pêcheurs se laissaient porter par la vague de retour de leurs sorties en mer. Le surf de loisir est, lui, apparu à Hawaii vers 300 quand les premiers Polynésiens débarquèrent sur l’archipel. Le sport est alors devenu une pratique courante de toute la nation. «Le surf tel qu’on le connaît aujourd’hui a été inventé sur une alaia, une planche de taille moyenne, entre 1,80 et 2,10 m de long, pesant environ 20 kg», au xixe siècle à Hawaii, raconte l’auteur. Le journaliste et écrivain Jack London participa à faire connaître ce sport au début du xxe sècle, quand, fasciné, il s’y essaya à Honolulu et décrivit son expérience dans la presse américaine. Ainsi, Matt Warshaw retrace la longue histoire de ce sport de glisse à travers de nombreuses anecdotes et personnages qui ont marqué le surf, jusqu’à aujourd’hui.
Une brève histoire du surf, Matt Warshaw, éd. Glénat, 272 pages, 25 €
Explorer le monde
A l’occasion des 80 ans de la Société des explorateurs française, Christian Clot, explorateur scientifique, dirige ce bel ouvrage collectif très dense puisqu’il recense 100 ans d’explorations, du début du xxe siècle avec Jean-Baptiste Charcot en Antarctique jusqu’à aujourd’hui et la mission de Thomas Pesquet dans l’espace. Car il n’est bien sûr pas uniquement question d’exploration maritime, même si celle-ci tient évidemment une grande place. Il y a les «aventures» de Henry de Monfreid en mer Rouge, l’invention du scaphandre autonome de Cousteau, le naufrage volontaire d’Alain Bombard, la mythique Golden Globe de Moitessier…
Sur terre, dans les airs, sous l’eau, sur les fleuves, à travers les déserts, dans les forêts, dans les montagnes, dans les milieux polaires, les grandes campagnes d’exploration françaises sont décrites avec l’appui de nombreux documents de qualité. Bible de l’exploration, ce livre indispensable transporte le lecteur dans des aventures uniques à travers le monde.
100 ans d’explorations, sous la direction de Christian Clot, préface de Bertrand Piccard, éd. Glénat, 224 pages, 35 €
Défendre l’océan
En 2017, l’association Sea Shepherd, fondée par le charismatique et très médiatique Paul Watson, fête ses quarante ans. Cet activiste écologiste ne cesse de se déplacer à travers le monde pour défendre la planète en général et l’océan en particulier, avec des actions en forme de coups de poing, largement relayées dans les médias pour avoir plus de poids encore. Exilé pendant deux ans en France, il a témoigné lors de la COP21 à Paris en décembre 2015 et sorti un petit livre, Urgence ! Si l’océan meurt nous mourrons (Glénat, 2016) : «L’auteur propose des solutions, souvent de bon sens, parfois plus extrêmes : produire local, manger local, arrêter de fabriquer des tonnes de produits en plastique qui dérivent dans l’océan et tuent la vie marine, arrêter la pêche industrielle, mettre en place une économie verte… Sans quoi, d’après Paul Watson, “nos sociétés ne survivront pas jusqu’en 2100”. »
Les missions que se donne l’association sont spectaculaires : renvoyer chez eux les chasseurs de baleines en Antarctique, faire cesser le massacre des globicéphales aux îles Féroé, empêcher le braconnage dans l’océan Austral, mettre fin à l’emprisonnement des animaux dans les parcs aquatiques… Quarante années de luttes acharnées sur lesquelles revient Lamya Essemlali, la fondatrice de la branche française de l’association.
Paul Watson, Sea Shepherd, le combat d’une vie, Lamya Essemlali, éd. Glénat, 312 pages + 24 pages de photos, 19,99 €